MOUSTIERS-SAINTE-MARIE - Le sentier découverte de Valx

Au XVIᵉ siècle, en Provence, l’économie fleurit et les bourgeois construisent des bastides à la campagne. Elles leur permettent d’exhiber leur aisance tout en jouissant du travail des fermiers, à qui sont confiées les terres. Ainsi émerge le domaine de Valx, véritable témoin de l’histoire locale. Le domaine est composé : d’une ferme, d’une bastide, d’une grange, d’un jas (bergerie) d’un pigeonnier ainsi que de nombreuses restanques (murs en pierres sèche aussi appelés terrasses) et des canaux d'irrigation

Sous l’ancien régime, les fermiers étaient des hommes pauvres du village, souvent des cadets dépourvus de terres ou des ainés dont les possessions ne suffisaient pas à nourrir la famille. Le contrat qui les liaient aux bourgeois était le bail de fermage. Le propriétaire percevait une rente annuelle, soit une partie des fruits du travail du fermier. Au XVIIIe siècle, le fermier donnait au propriétaire chaque année : la moitié des récoltes de grains, de fruits, 29 kg de laine, 16 kg de fromage, 6 douzaines d’œuf, 40 litres de truffes

Soucieux d’employer des matériaux peu coûteux, les agriculteurs utilisaient ce qu’ils trouvaient à proximité des champs pour leurs travaux. Témoins de cette architecture dite de « cueillette », les ouvrages en pierre sèche appelés restanques ou bancau structurent le domaine avec plus de 5 km de linéaire ! Issues de l’épierrage des champs, les pierres savamment ordonnées constituent des ouvrages qui permettent de délimiter les parcelles, de casser la pente ou encore de drainer les sols.

À la fois rare et précieuse, l’eau est indispensable à l’agriculture. Au domaine de Valx, elle occupe une place majeure. Sa présence a permis le développement d’une grande diversité de cultures, et notamment celle du chanvre qui nécessite beaucoup d’eau. Au domaine, un ingénieux système d’irrigation et de captation a été imaginé afin d’exploiter cette précieuse ressource. Comme c'était souvent le cas en Provence, le propriétaire était parfois attaqué en justice par ses voisins en aval qui n’avaient plus d'eau

« En 2016 et 2017, la source que j’avais jusqu’ici toujours vu couler s’est presque tarie. J’étais très inquiet, qu’allaient devenir les écrevisses ? J’envisageais des travaux pour améliorer le captage, améliorer l’étanchéité des canaux… Puis un jour, l’ancien fermier est passé et m’a dit : « Jeune, ne t’inquiète pas, c’est cyclique, tous les sept à huit ans, lors des fortes sècheresses, cette source ne donne plus rien, ça reviendra…» L’eau est revenue, la vie aussi. » Jordan Lacoste – PNR Verdon

« Autrefois, le berger nous faisait pâturer dans les collines alentour, à proximité du village. Chacun possédait un petit troupeau ou au moins quelques bêtes. Le pastoralisme permettait de moins consommer de foin en utilisant les ressources présentes dans la nature. On nous élevait pour notre viande mais surtout pour notre laine. Nous n’étions pas les seuls animaux à la ferme, il y avait aussi des cochons, des bœufs, des poules et quelques lapins… une alimentation variée toute l’année ! »

« Aujourd’hui les chèvres ont remplacé les brebis au domaine. Nos chevriers nous font aussi pâturer, les collines et on adore ça ! Ils nous conduisent là où la nourriture se trouve, alternant forêts, landes et garrigues. Comme autrefois, ils s’adaptent aux saisons, à l’avancée de la végétation. Nous pouvons manger beaucoup de plantes différentes et nous maintenons les milieux ouverts. C’est ainsi que nous procurons un merveilleux goût à nos fromages »

La culture en terrasses est une pratique ancestrale, déjà connue des gallo-romains, qui était bien adaptée au milieu méditerranéen. Ces terrasses étaient appelées en provençal "bancau" (banquettes) ou faïsses (bandes de terres), le terme restanques (du provençal restanca : retenir) étant réservé aux murets en pierre sèche qui retenaient ces terrasses. On cultivait sur les bancau aussi bien le blé que l’olivier et la vigne, ainsi que des carrés de légumes.

Au fil du temps, au gré des activités humaines, les paysages évoluent. Les pratiques agricoles se sont modifiées, la mécanisation a nécessité des parcelles plus grandes et plus accessibles. Les restanques ont été abandonnées et les systèmes d’irrigation endommagés par le passage des engins. Arbres de plein champ et ceps de vignes ont été arrachés. Les pratiques pastorales ont fortement diminuées, les parcelles se sont embroussaillées et la forêt a repris le dessus.

Le lac de Sainte-Croix, mis en eau dans les années 1970, créé une nouvelle dynamique économique mais transforme radicalement le territoire. La vaste plaine agricole devient alors une large étendue d’eau scintillante. Faites un saut dans le passé et découvrez le paysage que Flavie contemplait depuis cette gloriette qu’elle avait faite construire