Balade sonore - Découverte de Zittersheim

C’est dans des documents de gestion forestière de la fin du XVe siècle, que l’orthographe « Zittersheim » apparaît pour la première fois. Avant, le village fut nommé de diverses façons : Zuzelsa en 1132, citée comme ayant-droit de l’abbaye de Neuwiller, Zutzelsahe de 1335 à 1450 dans un document des comtes de Lichtenberg, Zuzental en 1440 ou encore Zutzensal en 1453. Quelque soit l’époque, la signification du nom reste la même : Zutzelsahe contient la racine indo-européenne TUT qui évoque l’idée d’alternance, soit en toponymie, un lieu « qui monte et qui descend de tous côtés ». Ce nom contient également le suffixe germanique AHA qui évoque l’eau. Enfin, dans le nom actuel de Zittersheim, « Zittern » en allemand signifie trembler et qui évoque également en toponymie cette notion d’alternance entre haut et bas. Ainsi, le nom du village renvoie directement à sa situation géographique un lieu vallonné où l’eau est abondante.

Avec Moderfeld, Zittersheim conserve environ 45 maisons paysannes. La plupart datent du XVIIIe siècle. Le décor présent sur l’encadrement de la porte d’entrée ainsi que les dimensions de la maison nous renseignent sur le statut du commanditaire et l’histoire du village. Les paysans à chevaux (laboureurs exclusifs) situés au sommet de la hiérarchie possédaient des maisons plus grandes, à deux niveaux d’habitation avec des dépendances (une grange entourée d’une étable et d’une écurie). La plus grande du village se situe au 4, rue de la Fontaine et date de 1820. Nous retrouvons ensuite les paysans – artisans ou paysans – ouvriers, dont la maison ne contient pas d’écurie ; et pour les moins aisés il s’agit d’un logis sans étage comme au 7, rue de la Montagne (1807). Au bas de l’échelle sociale se trouvent les journaliers et manœuvriers dont la maison ne contient pas d’étage et très rarement une grange, comme au 1, rue des Châtaigniers. Ainsi, les maisons étaient le reflet des activités du village, de par leur taille mais aussi via des emblèmes de métiers taillés dans le grès. La maison que vous avez devant vous, est la plus ancienne du village : la date de 1735 est gravée sur la clé d’arcade de la porte de la cave. Outre l'agriculture, d'autres activités se pratiquaient au village, comme le tricot. Les femmes se retrouvaient souvent pour tricoter ensemble. Cette activité manuelle procurait un revenu supplémentaire au ménage car les femmes tricotaient pour les dépôts. Écoutez ces habitantes vous en parler :

A Zittersheim, comme dans de nombreux villages du territoire, les récoltes rythmaient la vie quotidienne au fil des saisons. Écoutez cette habitante qui nous parle notamment de la récolte de cerises :

Observez ce panneau, il nous renseigne sur la présence de 12 sources autour de Zittersheim et témoignent de l’importance de l’eau pour le village. Aujourd’hui, si vous empruntez le sentier des 12 sources, vous ne les verrez pas en intégralité car certaines sont bien cachées ! Par temps chaud, il est agréable de se promener à l’ombre des arbres. Ces sources restituent les réserves d’eau emmagasinées dans le fameux grès des Vosges. Quelles sont ces fameuses sources ? - La source de Neumatt : elle alimente le réseau d’eau potable du village. Elle est raccordée à une fontaine présente dans Zitterhseim. - La fontaine du Kindsbrunne : les gens y venaient chercher de l’eau, y laver le linge ; et les animaux s’y abreuvaient. - La fontaine du village : avant l’installation du réseau d’eau potable dans le village en 1963, la plupart des habitants venaient s’y approvisionner en eau. Le bétail pouvait également s’y abreuver. - La source du Brandberg : le captage de cette source a été réalisé à l’origine par un agriculteur pour alimenter l’abreuvoir du pâturage situé derrière le banc. Le filet d’eau de cette source est presque constant tout au long de l’année. - La source du Kuhberg : au début du siècle dernier, les vaches venaient paître jusqu’à cet endroit d’où le nom de « montagne des vaches ». C’est par ce col que venaient les marchands d’Erckartswiller ou de La Petite Pierre. - La source du Senntal : situé au fond d’une verte vallée, le débit de cette source est relativement important. - La source du Weinberg : au début du siècle dernier, on cultivait la vigne sur ce flanc de montagne exposé plein sud. - La source du Tal : cette petite cascade se situe au fond de la Vallée du Tal qui débouche sur la place de l’Eglise. - La source de la Moder : l’aménagement de la source et du mur qui la borde a été réalisé successivement depuis 1997 par une entreprise d’insertion de demandeurs d’emploi et de deux chantiers internationaux de jeunes bénévoles. - La source du Birnbaumtal : une eau abondante y coule toute l’année avec pour particularité d’être très fraîche ! - La source du Moderthal : elle est accessible grâce à la construction de deux passerelles par un chantier de jeunes en 2003. La source est nichée dans une zone humide à la flore abondante. - Les Sources de l’étang communal : cet étang est alimenté par des sources de fond en complément d’une dérivation sur le ruisseau. En parlant de sources et d'eau, écoutez le témoignage de cette habitante qui nous parle de l'arrivée de l'eau courante, de l'électricité et de la première salle de bain :

La présence d’une église dans le village est attestée au XVIe siècle. Le bâtiment composé de moellons de grès et de colombages ressemblait davantage à une maison d’habitation. Cette église, située à une dizaine de mètres de l’actuelle, était entourée par le cimetière. L’église protestante que vous voyez aujourd’hui, fut précédée par une autre érigée en 1740. A la fin du XIXe siècle, la décision de fermer l’église fut prise car le bâtiment devenait trop vétuste. Le dernier culte eu lieu en 1892, juste avant sa démolition. Mais comment un village modeste pouvait-il financer la construction d’une toute nouvelle église ? Un document de 1889 mentionne un appel à la générosité lancé par le pasteur du village pour financer les travaux. Le coût de ce nouvel édifice était estimé à 30 000 mark ; l’Etat a financé à la hauteur de 10 000 mark, le Directoire 4 000, les paroissiens 3 500 ; et le reste fut principalement couvert par la commune. C’est ainsi que la nouvelle église put voir le jour en 1893. En 1917, les cloches sont réquisitionnées pour être fondues afin d’alimenter les usines d’armement. Elles sont remplacées en 1923. L’histoire de l’église connaît un nouveau rebondissement dans la nuit du 15 au 16 décembre 1946, nuit pendant laquelle un incendie ravage l’édifice, ne laissant derrière lui que les murs et le clocher. L’orgue détruit par les flammes ne sera jamais remplacé. Se pose alors à nouveau la question du financement. Pour découvrir comment la commune a pu reconstruire son église, passez au point d’intérêt suivant ! Les cloches de l'église rythmaient le quotidien des habitants mais ce n'étaient pas les seules cloches à sonner...connaissez-vous le métier d'appariteur? Pour en savoir plus, écoutez ce témoignage :

La nuit du 15 au 16 décembre 1946, un incendie se déclare dans l’église et fait de nombreux dégâts : l’intégralité de la charpente est détruite et le mobilier intérieur se voit ravagé. Le montant des travaux pour remettre l’église en état est très élevé et la commune ne peut couvrir l’intégralité de ces frais. Grâce à un généreux don privé d’une riche famille américaine du Texas : les Dougherty, les travaux peuvent être lancés. Mais pourquoi une famille du Texas aiderait une commune alsacienne dans la détresse ? Leur fils, Samuel, était pilote militaire : son avion s’est écrasé non loin de Zittersheim le 27 septembre 1944, après avoir été attaqué par l’armée allemande. Les habitants du village ont donné à ce pilote américain une sépulture dans le cimetière communal. Cet acte n’était pas sans risque en pleine Seconde Guerre Mondiale. Ainsi, lorsqu’en 1946 l’église de Zittersheim fut la proie des flammes, la famille Dougherty fit un don à la commune pour remercier les villageois d’avoir permis à leur fils de reposer en paix. Le 6 décembre 1950, quatre ans après l’incendie, l’église restaurée est inaugurée. Si vous suivez le circuit, vous pourrez découvrir le lieu où l’avion de Samuel Dougherty s’est écrasé, rendez-vous au point d’intérêt M.

Comme expliqué précédemment (point d'intérêt B), voici un bel exemple de maison de paysans à chevaux / laboureurs exclusifs. Nous y retrouvons de beaux volumes, deux niveaux d'habitation, et des dépendances constituées d'une grange entourée d'une étable pour les vaches et d'une écurie pour les chevaux. A Zittersheim, on retrouve les deux types d'encadrement d'Alsace Bossue : baroque et néoclassique. Ici, vous pouvez admirer le décor le plus riche du village, de style néoclassique. Plongez dans le quotidien des habitants du village au milieu du XXe siècle en écoutant le témoignage de ces zittersheimoises :

Au 7 et 8 rue de la Montagne, découvrez deux maisons de paysans-artisans. Au numéro 7, la maison datée de 1807 présente un logis à un niveau; la famille était donc moins aisée que celle vivant au numéro 8 datée de 1803 qui possède deux niveaux d'habitation. Ce type de maison est le plus répandu dans le village. Même si une grande majorité des habitants travaillaient en tant que paysans, d'autres allaient tous les jours à l'usine. Pour en savoir plus sur le quotidien des habitants, écoutez ce témoignage :

Vous vous trouvez actuellement devant l'ancienne école du village. Écoutez le témoignage de ces habitantes qui ont fréquenté cette école, elles nous parlent notamment de la place de l'alsacien :

Les journaliers se situaient au bas de la hiérarchie sociale ; leur travail dépendait directement des laboureurs. Ils possédaient une vache ou quelques chèvres. De condition très modeste, leur maison n'a ni étage ni grange comme vous pouvez le voir ici. Au fil du temps, le village a évolué et les paysans ont peu a peu disparu ; ces habitantes nous en parlent :

Sur les hauteurs de Zittersheim, (à 5 minutes en voiture / 40 minutes à pieds) se trouve le lieu-dit Moderfeld. Ce hameau fut créé au début du XIXe siècle sur le plateau à 370 m d’altitude, autour de la source de la Moder officiellement reconnue en 1741. Voici la traduction du document de 1741 par lequel Jean-Michel KATZEL authentifie la source de la Moder à Moderfeld : Le 11 juillet 1741, Je soussigné certifie par la présente, la signature de mon nom et l'apposition de mon cachet faisant foi, que lorsque j'ai participé il y a environ 20 ans au renouvellement du ban de Zittersheim et que j'ai pris les mesures du Moderfeld, on m'a indiqué et montré le Moderbronn (source de la Moder) qui porte le nom de ce champ et je me suis assuré de façon formelle que cette source est l'origine de la rivière Moder et que la rivière en question tient son nom de cette source. Cette communication a été faite sur demande. Struth, le 11 juillet 1741 JM. Katzel La Moder est un affluent du Rhin et la rivière la plus importante du Nord de l’Alsace. Elle parcoure de nombreux paysages et divers villages et villes. Les anciennes cartes du territoire prêtent plusieurs noms à cet important cours d’eau : Madra, Matra, Mutter, Moter ou encore Mother. Tous ces noms se rattachent à la Mère, source de vie tout comme l’eau est une source de vie pour les hommes et les animaux. La source de la Moder, au lieu-dit Moderfeld, est matérialisée par un lavoir en grès construit en 1782. Ce lavoir se compose d’un bassin de captage couvert suivi de deux bassins en équerre comportant des pierres de lavage. Il est accessible par un chemin pavé bordé par un mur.

En empruntant le sentier des 12 sources (balisage : anneau bleu), enfoncez-vous au creux du vallon, au cœur de la forêt. Après une quinzaine de minutes de marche, vous découvrirez un lieu insolite que peu de personnes connaissent ! On y voit une grande pierre, des panneaux, et…des morceaux de carlingue d’un avion ?! Vous vous trouvez ici sur les lieux d’un drame qui a eu lieu pendant la Seconde Guerre Mondiale. Le 27 septembre 1944, Samuel Dougherty survolait le Pays de La Petite Pierre à bord de son avion militaire. Cet américain, ne se doutait pas qu’en ce jour, il ne reverrait plus son Texas natal. Suite à une attaque allemande, l’avion du militaire texan s’écrase au milieu de la forêt, non loin de Zittersheim, le 27 septembre 1944. Seuls souvenirs du passage de Samuel Dougherty, des morceaux d’avion jonchant le sol forestier des alentours de Zittersheim. Malgré un climat tendu lors des affrontements de la Seconde Guerre Mondiale, les habitants prirent le risque d’enterrer l’aviateur et de lui offrir une sépulture digne de ce nom au sein du cimetière du village. Les zittersheimois se virent récompenser pour ce geste : la famille du défunt fit un don pour permettre à la commune de reconstruire son église suite à un incendie en 1946. La tombe de Samuel Dougherty n'est plus visible aujourd'hui, elle se situait dans l'ancien cimetière du village et fut ensuite déplacée au Texas, terre natale du militaire.