LAMANON - La plaine paysanne de la Durance en gravel

Près du château de Lamanon se trouve le platane tricentenaire classé Monument naturel et surnommé le Géant de Provence : il mesure 25 m de haut, son tronc fait 8 m de circonférence et sa frondaison s’étend sur 1530 m². Si son âge précis n’est pas connu, deux versions de ses origines coexistent : il aurait été planté vers 1658 par Diane de Roux de Lamanon pour célébrer le baptême de sa fille, ou bien il aurait été planté en 1564 par Catherine de Médicis sur son chemin pour rendre visite à Nostradamus.

Édifié par le comte François Rostain de Cadenet de Craponne de Lamanon, le château est un bel exemple des bastides provençales du XVIIe s. Son architecture savante et son parc arboré, irrigué par le canal de Craponne-Boisgelin, datent de 1660. Moins d'un siècle plus tard, le roi donne l'autorisation au marquis Mark de Tripoly de Panisse de construire une cinquantaine de maisons pour loger les ouvriers agricoles et leur famille, donnant naissance au village de Lamanon en 1745. 

La Durance a modifié son cours plusieurs fois au fil du temps. Depuis 18000 ans, elle s’écoule au nord des Alpilles par le seuil d’Orgon. Ce resserrement entre les massifs calcaires des Alpilles et du Luberon fut longtemps un point de passage obligé, participant à la prospérité du village. Dans son lit majeur, le dense réseau de haies protège des vergers de fruitiers (pommiers, poiriers, pêchers, abricotiers…) dont les besoins en eau sont particulièrement adaptés à ces terrasses alluviales.

Le lac Lavau est dominé par des pitons et des arêtes rocheux. Il s’agit de failles mineures à faibles rejets verticaux présentant un bel effet géomorphologique dans le paysage. Le lac occupe une ancienne carrière. Il est alimenté par l’infiltration des eaux pluviales du plateau des plaines. Ce vaste plateau calcaire (Karst) alimente en eau des sources dont certaines constituent de petites résurgences temporaires.

Les vergers sont installés principalement entre la Crau, la plaine du Comtat et le Val de Durance. Le Parc des Alpilles recense environ un quart des surfaces de vergers du département. Les cultures de pêchers, pommiers et poiriers sont prédominantes. Les cultures sont majoritairement exportées, bien que le développement de circuit court et de culture bio s’accroît de plus en plus.

La haie de cyprès constitue le brise-vent par excellence dans la région. Son port naturel très étroit lui permet de prendre peu d’emprise et de limiter l’ombre sur les cultures. Sa taille et sa croissance rapide sont également des atouts. Le cyprès s’adapte à une multitude de sol et supporte parfaitement les conditions climatiques méditerranéennes très rudes pour d’autres végétaux. Favorables au déplacement de la faune, les haies servent de corridor écologique pour de nombreuses espèces.

Dans la plaine de Sénas, les cultures maraîchères, les champs d’aromates et les vergers de fruitiers s’épanouissent sur les riches terres déposées par la Durance, protégées du mistral par les haies de cyprès et de peupliers. Les produits de cette agriculture diversifiée et dynamique se retrouvent chaque samedi sur le marché paysan de Sénas, l’un des plus actifs et fréquentés de la région.

Si Sénas doit son riche terroir agricole à la Durance, la ville a longtemps payé le prix de sa proximité avec la rivière. Au XIXe s., trois crues exceptionnelles inondent la ville avec des dégâts colossaux en 1843 : digues rompues, 6 ponts emportés, routes coupées, chaussées détruites, riverains ruinés… Avant les ouvrages hydrauliques qui en contrôlent désormais le débit, ces crues destructrices ont inspiré l’adage « Mistral, Parlement et Durance sont les trois fléaux de Provence ».

La construction du canal débute en 1773 sous l’autorité de l’archevêque de Boisgelin, président du Parlement de Provence, pour alimenter le nord des Alpilles suite à plusieurs sécheresses successives.L’aménagement des berges, qui donne leur forme particulière aux ponts qui l’enjambent, est réalisé autant pour l’entretien du canal que pour le halage de bateaux. A sa construction, le canal devait « assurer la navigation, fournir l’énergie nécessaire aux moulins et irriguer les terres agricoles ».