De Landin à Fratin par la croix Jean Lecouturier

Située dans le quartier de Landin, à proximité de l’actuel bowling-brasserie Karakillos, l’ancienne gare de Sainte-Marie-sur-Semois est encore présente le long de la voie ferrée, maintenant inutilisée, qui relie Marbehan à Croix-Rouge et au zoning de Gantaufet. Ouverte en 1873, cette gare desservait la ligne 155 Marbehan-Ecouviez (en France), en passant par Virton. La gare s’appelait Poncelle jusqu’en 1885.

A Landin, dans le quartier de la gare à Sainte-Marie, se trouvaient jadis deux cafés. Le plus connu est le café Moreaux, juste à côté de la gare. Il prit le nom de "café de la gare", puis "café de la gare et du tram", puis "hôtel Moraux", "café Moreaux", "à la bonne franquette" avant de devenir actuellement le "Karaquillos". C’est Louis Moraux, le grand-père de Roger Moreaux, à qui l’on doit le dictionnaire du patois gaumais, qui l’a construit au début des années 1890. Louis était un passionné de photographie, pionnier pour son époque. Vers 1893, le bâtiment initial a été rehaussé pour offrir plus de chambres. Plus tard, vers 1934, Marcel, le fils de Louis, a repris le café. Un bowling existait déjà à cette époque. Marcel était un amuseur, un poète, un chansonnier, un homme de théâtre. Il a animé le bistrot qui a alors connu des années folles C’est en 1999 que Ludovic Penning y ouvrit le Karaquillos comprenant un côté brasserie et un côté jeu de quilles.

La ligne du vicinal n°523 entre Etalle et Villers-devant-Orval a vu le jour en 1908 et fut supprimée en 1935 et remplacée par un service de bus. L’arrivée à la gare de Sainte-Marie était particulière, dans la mesure où le tram devait assurer la liaison avec la ligne de train L155. Le tram quittait donc momentanément le tracé de la grand ’route (actuelle N83) pour décrire une grande boucle et se faufiler devant le café Moreaux (actuel Karaquillos), qui était donc entre les deux voies ferrées, et s’arrêter pour charger et décharger des voyageurs, des marchandises et du courrier transportés par le train de Marbehan ou Virton. Le tram peut en effet être deviné en bas à droite des photos d’époque.

"Landin" n’est plus actuellement que le nom du lieu-dit désignant le quartier de la gare. Pourtant, au Moyen-Age, Landin, à l’ouest de Sainte-Marie, était un village à part entière avant la peste noire qui le décima en 1636. Le nom "Landin" est dérivé du germanique landa qui signifie terre, champ, comme le terme néerlandais land. La "peste noire" est le nom donné à la grande épidémie de peste bubonique, qui a sévi dans nos régions au XVIIe siècle, elle-même accompagnée d’autres maladies, comme le typhus, et de guerres dévastatrices. Tous les villages furent touchés, mais comme le hameau de Landin n’était pas très peuplé (4 maisons seulement en 1602), aucun habitant ne survécut et le village fut tout à fait décimé. Le quartier reprit un nouvel essor au début du XXe siècle, avec la gare et le tram, la scierie Stiernon sur la route de Poncelle et la scierie Dussard, de l’autre côté de la grand ’route (établissement repris en 1983 par la famille Stiernon).

Au pied d’un hêtre pourpre (Fagus sylvatica) remarquable par sa taille (3 mètres de circonférence) et repris dans l’inventaire des arbres remarquables (disponible sur le géoportail de Wallonie) se trouve la croix de Landin. L’ensemble arbre et croix, plus quelques maisons, sont situés dans le grand espace de voirie sur la N83 qui laisse deviner le tracé originel de la route nationale avant sa modernisation, à l’angle avec la rue de Bertauvaux. La croix est en bois, d’environ 2 mètres de hauteur, avec un petit Christ noir. Il est probable que cette croix fut érigée en commémoration de la peste qui décima le hameau de Landin en 1636.

Le parcours croise l’actuelle rue de Bellefontaine, qui est une partie de la chaussée romaine Reims-Trèves, construite par l’empereur Claude en 44 de notre ère. Un peu à l’ouest de ce croisement, à Gibaupont, à l’endroit où le chemin de fer passe sur la chaussée, un passage à niveau à barrières était présent ainsi qu’une maisonnette de garde-barrière. C’est lors de la construction de cette maisonnette, vers 1889, qu’on a pu mettre à jour des vestiges de la chaussée romaine, qui constitue encore l’assise de la route de Bellefontaine. Les matériaux utilisés pour cette route ont été jugés plus résistants que n’importe quel béton et la construction d’une dalle pour la maison n’a pas été utile.

Située au croisement de la rue de Bellefontaine et du chemin qui poursuit la rue de Bertauvaux à Sainte-Marie, cette croix fut inaugurée à l'occasion d'une mission en 1912. La croix, à l’époque, était beaucoup plus grande. Le christ est de la même facture que celui du calvaire érigé à Etalle en face de l'ancien presbytère, puis déplacé au carrefour de la N83 et de la N87b.

Le terme "poteau" revient fréquemment comme toponyme dans nos régions, avec la signification de "limite" ou de "borne entre deux bans".

Le toponyme "rappes" est à rapprocher de raspe, signifiant, bois et taillis. Une rue porte ce nom dans le lotissement communal proche. Cette appellation a été décidée en conseil communal en 1978 pour remplacer l’ancienne, qui était "Nouvelle Rue".

Couture vient du mot latin cultura, qui signifie terres cultivées et souvent terres de bon rapport. On peut également trouver le substantif féminin coûteure, signifiant sole, endroit du ban groupant les mêmes cultures. Par ailleurs, sur les plans cadastraux, on trouve l’orthographe "couterie". A proximité, on peut observer la "Croix Jean Lecouturier" et un lieu-dit "La creux Jean Le Couterie". Plutôt que d’un patronyme "Lecouturier", il est probable que le nom de ces endroits soit dérivé de "couture", dans le sens de terres cultivées.

Au pied d’un majestueux marronnier d’Inde (Aesculus hippocastanum), au croisement du parcours avec la voie du Banel, se trouve la croix Jean Lecouturier. L’arbre est repris dans l’inventaire des arbres remarquables de Wallonie, pour son intérêt paysager (presque 3 mètres de circonférence et 14 mètres de haut) ainsi que religieux, par sa proximité avec la croix. Celle-ci, initialement en bois, a été remplacée en 1989 par une croix métallique, au même endroit. Ce devait être un endroit de repos et de méditation avant les extensions d'habitat faites dans les années 1960…1970. Il n’est pas certain que Jean Lecouturier soit un réel personnage qui aurait pu faire ériger cette croix, et le nom de la croix pourrait provenir du nom du lieu-dit "La couture".

Comme pour la Fontaine des Malades, entre Vance et Etalle, à cet endroit jaillit une source, en l’occurrence, c’est celle du "Mauvais Ruisseau", qui continue vers l’actuel zoning de Gantaufet. Cette source forme une fontaine, auprès de laquelle on conduisait, selon une tradition qui s’est transmise, les grands malades en temps d’épidémie de peste, pour les soigner et surtout pour les éloigner du village. On établissait à ces endroits, certainement à cause de la proximité de l’eau, des huttes ou cabanes dans lesquelles étaient abrités ceux qui étaient considérés comme perdus sans remède et qui y vivaient leurs derniers moments.

Ce lavoir est situé rue du Magenot, à Fratin, à 150 mètres au-delà du cimetière, à droite de la route en allant vers Sainte-Marie. Il est actuellement utilisé comme local pour le club des jeunes de Fratin. Il a été construit en 1882, en même temps et avec la même architecture que celui de la rue du Magenot à Sainte-Marie. On remarque notamment les 4 baies de faible hauteur, très rapprochées, sur le côté long du bâtiment, avec appui commun sur console plate et la porte à linteau bombé, dans le pignon. L’eau s’introduisait abondamment sous le mur du fond du bâtiment et envahissait toute l’aire du local pour en ressortir par la porte d’entrée.

Ce toponyme désigne l’endroit, situé en face du calvaire des Aisances ("creux" = "croix") et un peu plus élevé que celui-ci. C’est là que se situe le château d’eau qui alimente Fratin en eau potable. C’est en 1984 que la commune a remplacé ses anciens châteaux d’eau. L’ancien château d’eau de Fratin a été dynamité (photo). La silhouette de la tour élevée et élancée du château se mêle avec celles des croix du cimetière, entouré de ses murs façonnés en pierre de France.

Deux chênes pédonculés (Quercus robur) sont bien mis en évidence en face du cimetière de Fratin. Leur intérêt est essentiellement paysager, avec leur circonférence de 3 mètres et leur hauteur de 21 mètres.

Collée au mur clôturant la prairie, le long de la rue du Magenot, en face de la très belle ferme typique lorraine Vuylsteke, cette croix en fer forgé est plantée sur une grosse pierre de taille et annexée à l’extrémité du mur. Elle est surmontée d’une deuxième petite croix qui provient de l’ancienne chapelle de Fratin. Ce calvaire fut érigé en 1868 par Mr Eppe de Vance, acquéreur des aisances communales, parcelles de terre mises à la disposition des habitants et qui furent vendues pour la construction de l’église de Fratin, aisances qui se trouvaient derrière l’emplacement du calvaire. Dans la niche, en 1935 fut placée une statuette de Notre-Dame de Lourdes. Elle rappelle aux villageois l’ancienne chapelle dédiée à la Vierge.

Cette imposante ferme porte le millésime "1866" au-dessus de la porte du logis. Elle a été remaniée, mais reste très homogène et fidèle à l'architecture d'époque. A l'origine, elle était quadricellulaire, avec une étable maintenant annexée au logis et deux nouvelles, édifiées à droite. Les linteaux sont droits et la grange est en arc surbaissé. Sur le mur-pignon à droite, baies avec arc surbaissé. C'est dans ce bâtiment que se trouve le café populaire le Point B'arts, qui est aussi un espace-rencontre pour les artistes, ainsi que des gîtes et le restaurant "Lady Green". Il s’agit d’une des fermes les mieux conservées de la commune. Elle a d’ailleurs servi de modèle à Jean-Claude Servais pour la BD "Le tempérament de Marilou" (Tome 2, page 8).

Cette ferme date de 1856, avec un millésime sur table à la façade quadricellulaire. Le logis est à droite, il comporte deux larges travées de deux fenêtres, avec une porte partiellement obturée. Une travée supplémentaire a été édifiée à droite vers 1900, avec des trous d’attente pour les solives d’une quatrième travée. A gauche, se trouvent les étables et une porte de grange avec arc surbaissé sur sommiers anguleux. Plusieurs baies de combles, des linteaux droits. L’élévation arrière a été modifiée. La corniche est en calcaire en chanfrein. La toiture présente une croupette à droite.

Ce toponyme désigne l’espace situé derrière les maisons en demi-cercle de la place de la Moisson et de la rue du Vivier. Cet ensemble de bâtiments contribuait largement à la vie du village, puisque c’est au 32 Place de la Moisson que se situait l’école (actuellement local du basket de Fratin) et au 31, en face de l’actuel garage Masson, se trouvait un café. Notons en passant que le club de basket de Fratin a été créé dans les années 1950 par le maître d’école Edouard Clausse (voir photo), qui voulait ainsi occuper les jeunes du village pendant leur temps libre. Le premier panier a été réalisé avec un seau galvanisé sans fond sur un piquet et le terrain était en terre battue.

En face de la place de la Moisson, au début de la rue du Magenot, cette ferme quadricellulaire possédait autrefois une grangette. Le logis est à gauche, à redent, au moins de la première moitié du XIXe siècle. Trois travées au total sur deux niveaux, fenêtre au rez-de-chaussée à linteau bombé à soffite droit et cavet ; entrée de cave dans le renfoncement. Corniche calcaire en doucine. La façade agricole était autrefois en oblique et probablement contemporaine de la ferme voisine (au 9 rue du Magenot). Arc de grange médian, corniche en chanfrein. Au mur pignon gauche, se trouvaient deux travées de deux fenêtres de largeur décroissante. L’élévation arrière a été détruite. Les linteaux sont droits sur l’ensemble.

La pompe est située sur la place de la Moisson, à Fratin, en bordure de la route (qui devient la rue du Vivier au-delà de la place), près d’un abri de bus. Elle date de la fin du XIXe siècle ou du début du XXe. Elle est en fonte, avec une base à motifs végétaux, un corps carré aux angles brisés et un amortissement en forme de gland. On peut lire une inscription : "W.CARVENS/ANVERS". Elle est accompagnée d’un abreuvoir rectangulaire en calcaire gris, habituellement fleuri.

Située en face de la grande place centrale de Fratin, deux maisons plus loin que la marbrerie Cremer, cette ferme à deux faîtes étagés date au moins de la première moitié du XIXe siècle. Le logis est à gauche, de deux travées sur deux niveaux, avec une disposition irrégulière des fenêtres. Des baies de combles sont observables au mur-pignon. La toiture, sur cette partie, présentent des croupettes. La façade agricole est tricellulaire, elle a été remaniée vers 1900. L’arc de grange est surbaissé sur sommiers anguleux. Les linteaux sont droits d’origine, tandis que les linteaux bombés sont plus récents.

L’arbre remarquable est un chêne rouge d’Amérique (Quercus rubra), sur la place de la Moisson à Fratin, sur l’espace enherbé, juste devant l’église, à l’angle des routes de la place. Sa circonférence est de 252 cm et sa hauteur est de 17 m. Il a un intérêt paysager et "folklorique ou religieux", par sa proximité avec l’église.

Rebâtie en 1843, elle se dresse sur la magnifique place herbeuse au centre de Fratin. Elle est de style néo-gothique, ainsi que son mobilier, mais sa voûte est romane. Elle a remplacé une ancienne chapelle, qui se dressait à côté de l'endroit de l'église actuelle et qui a été transformée en école, puis démolie en 1932. La nouvelle paroisse de Fratin devint autonome en 1877 et fut dédiée à Saint-Antoine de Padoue. A voir dans l'église, l'autel majeur, avec les agneaux de l'apocalypse et un retable avec calvaire entre deux anges, datant de 1900. Le mobilier néo-gothique est resté en place et est valorisé par la polychromie architecturale. Notons en passant que le nom "Fratin" viendrait probablement du latin "frater", qui veut dire frère, parce qu’au XIIIe siècle, les frères de l’abbaye d’Orval prirent possession du lieu et le mirent en valeur en y bâtissant une ferme.