Balade sonore - Découverte du village d'Eschbourg

Prenez le temps d'admirer la vue qui s’étend face à vous. D’un côté, la forêt à perte de vue (à l’Est), de l’autre, les champs et le plateau lorrain (à l’Ouest). La chaîne des Vosges se dessine au loin avec notamment le rocher de Dabo, le Donon... Observez le paysage et imaginez-vous au sein d’une clairière vide de tout arbre suite aux grands défrichements du Moyen Age. C’est là que s’est installé Eschbourg, sur une crête située à 330 m d’altitude. Nous sommes ici au niveau du réservoir de la commune. L’eau a toujours été une préoccupation importante à Eschbourg. Le sol sablonneux du site étant rapidement sec, il a fallu trouver des solutions à l’approvisionnement en eau. Sandhäs, ce mot alsacien signifie « lapin de sable », c’est le sobriquet des habitants d’Eschbourg qui s’oppose aux Lehmhäse de Petersbach, « les lapins d’argile ».

Dans le temps, il y avait plusieurs épiceries au village mais certains produits étaient apportés par des marchands ambulants (cirage, vaisselle, tissus...). Les habitants d'Eschbourg vous en parlent :

Au village, les hommes travaillaient pour subvenir au besoin de leur famille. L’été, ils étaient aux champs ou dans les carrières de grès ; l’hiver venu, c’était la période du bûcheronnage. En plus des tâches quotidiennes, les femmes participaient également à l’apport de revenus en travaillant à domicile. A Eschbourg, les femmes tricotaient. Parfois, elles se réunissaient pour travailler, ces moments de partage étaient également l’occasion de discuter et laisser libre cours aux commérages ! Tout comme les jours de lessive autour du lavoir, le tricot était un moment de convivialité pour les habitantes du village. Au fil du temps, le tricot est devenu une véritable industrie manufacturière : chaussettes, chaussons, layettes, bonnets, gants, grenouillères…il y en avait pour tous les goûts ! Les tricoteuses travaillaient des tissus différents : laine, angora, soie… Les matières premières étaient fournies par les commanditaires : les grandes usines de Phalsbourg ou de Lutzelbourg en Lorraine et d’autres plus éloignées. Le développement de cette industrie entraîna l’ouverture de dépôts dans le village : rue du Moulin, rue Principale, rue des Vergers… C’est dans la rue Principale que le premier dépôt fut ouvert, dans la maison de la sage-femme, qui fournissait des vêtements pour bébés. Écoutez plusieurs habitants du village parler du tricot et d'un objet utilisé pour tricoter, l'affiquet :

Au n°52 de la rue principale, se trouve la maison de l’ancienne sage-femme du village. Les volumes sont simples, un habitat monobloc. Les décors se retrouvent au niveau de l’encadrement en grès de la porte d’entrée. Regardez bien la façade… on dirait des pierres de taille, des blocs de pierre soigneusement taillés. Ne vous y trompez pas ! La technique utilisée est appelée « waffelhüs » ou crépi gaufré. Drôle de nom…Vous trouvez que ça ressemble à une gaufre ? Le crépi gaufré est une technique de mise en œuvre en architecture qui permet d’imiter la pierre de taille. Cette technique est peu répandue en Alsace, on en trouve des exemples exclusivement dans le Pays de La Petite Pierre et à ses limites. Mais qui a eu cette judicieuse idée ? C’est à la fin du XVIIIe siècle que des immigrés italiens développent l’emploi du crépi gaufré pour embellir les maisons du Pays de La Petite Pierre. Il s’agit d’un crépi à la chaux traditionnel coloré grâce à un mélange de sable rouge obtenu par le pillage de briques. C’est donc ici que résidait la sage-femme, une personnalité importante du village. Appelée également « accoucheuse » ou « matrone », la sage-femme aidait les habitantes à mettre leurs enfants au monde. Elle les accompagnait tout au long de leur grossesse en leur promulguant des conseils. En plus de ce rôle social, la sage-femme remplissait aussi un rôle religieux ; elle était souvent chargée de présenter l’enfant sur les fonts baptismaux et devenait ainsi sa marraine. Annette nous confie ses souvenirs de la sage-femme du village :

Comme de nombreuses communes du Pays de La Petite Pierre, Eschbourg possède de beaux exemples de l’habitat traditionnel d’Alsace Bossue. Ces maisons de type maison-bloc ou « Eindachhüs », présentent une façade parallèle à la rue. L’appellation de « Eindachhüs » signifie que le logis et les bâtiments d’exploitation sont réunis sous un même toit. Ces maisons se situent en recul de la rue, laissant la place pour l’usoir qui s’apparente à une cour ouverte servant à la fois de lieu de stockage (fumier, tas de bois…), d’espace dédié aux activités agricoles et de lieu de sociabilité. Une autre particularité permet aisément de reconnaître ce type d’habitat : le schopf ou l’appenti dont le toit s’avance vers l’usoir et repose sur des poteaux en bois. Cette avancée du hangar abrite l’entrée de l’étable et de la grange où peuvent être stockés le bois de chauffage, les clapiers, l’outillage agricole. Le schopf permet également d’effectuer du bricolage, de faire sécher les fûts après distillation et même d’y tuer le cochon ! Les matériaux utilisés pour la fabrication de ces maisons sont directement liés aux ressources naturelles du lieu : le bois pour les éléments structurants et le grès pour l’enveloppe du bâtiment. La simplicité de la façade est agrémentée par des éléments en pierres de taille et un décor concentré essentiellement sur les encadrements de portes et de fenêtres, les soubassements et les chaînages d’angles. A l'occasion du messti, la fête du village, le schopf était bien utile! On y tuait le cochon pour restaurer les villageois ; il pouvait également accueillir certains stands comme nous le racontent ces habitants :

Partagez avec ces habitants leurs joyeux souvenirs d'hiver lorsqu'ils descendaient en luge à vive allure la rue de l'église et la rue principale :

Écoutez l'histoire de ces habitants du village qui étaient enfants lorsque la Seconde guerre mondiale a éclaté. Ils nous racontent ce qui arrivait lorsqu'un élève parlait alsacien à l'école :

Levez les yeux vers le clocher de l'église et écoutez le témoignage d'Annette pour remontez à l'époque où les cloches était actionnées à mains d'homme. Le son des cloches rythmait la vie du village, aucune fausse note n'était donc permise!

Au n°8 de la rue du moulin, prêtez attention aux quatre lettres inscrites sur la façade de droite : CMDP, Caisse Mutuelle des Dépôts des Prêts. En effet, ce bâtiment à l’allure originale n’a pas toujours été une maison d’habitation. Il nous plonge dans l’histoire et les origines du mouvement mutualiste, en Rhénanie. Au milieu du XIXe siècle, Frédéric-Guillaume Raiffeisen, touché par la détresse du peuple dont les fermes agricoles et le bétail sont aux mains des usuriers, s’engage dans un combat contre la pauvreté. Il fonde ainsi plusieurs structures comme l’association pour le pain, l’association d’aide pour les citoyens démunis ou encore la société de secours aux agriculteurs. Ces structures posent les bases du mouvement coopératif et solidaire du Crédit Mutuel. La plus ancienne Caisse de Crédit Mutuel sur le modèle de Raiffeisen est celle de La Wantzenau, non loin de Strasbourg, qui date de 1882. Les principes mutualistes insufflés par Raiffeisen connaissent rapidement un essor en Suisse, Autriche et Allemagne. Leur développement est facilité au sein d’une population à forte culture communautaire, notamment auprès des communautés religieuses. Aujourd’hui, Raiffeisen est le troisième groupe bancaire de Suisse.

Dans le temps, les habitants du village partaient ramasser le bois mort, cueillir des myrtilles...Revivez ces moments en les écoutant :