METHAMIS - Histoire insolite d'un 9 avril 1919

Avant de vous lancer par monts et par vaux sur les chemins, vous devez savoir une chose ! Ce qui réunit les sentiers de Villes-sur-Auzon et Méthamis, ce sont les profondes et sombres Gorges de la Nesque. Il s’y passe des choses... et si l’histoire qui est ici contée est une fiction, sachez que bêtes et hommes ont bel et bien existés, que leurs pas, leurs chants, leurs galéjades ont résonné dans la montagne. Suivez Alice, la bugadière et sa couquinasso de cabro.

Yvonne BURGUES, 1991, Les Badaïres de Méthamis, Association Les Badaïres.Sous la direction de Louis CAGIN, 2017, Pierre sèche – Théorie et pratique d’un système traditionnel de construction - Éditions Eyrolles.Parc naturel régional du Luberon, 1994, Bories, Édisud.Serge TRUPHEMUS, 2017, Vaucluse 14-18 – Vivre à l’arrière durant la grande guerre, C’est-à-dire Éditions.Paul PEYRE, 2012, Toponymie du Ventoux Les carnets du Ventoux - Les Carnets du Ventoux, Éditions du Toulourenc.Remerciements à l’association des Badaïres pour son implication dans la préservation des patrimoines de Méthamis et leur soutien dans la conception de ce sentier. Un grand merci à Gilbert, Alain et Muriel.

Notre histoire se passe au retour de la Grande Guerre.  La France se motorise. Tout va prendre de la vitesse, les horizons vont s’étirer. On produit plus vite, on vend plus loin.Les paysans subissent cette accélération de la société. Le temps long des saisons s’estompe.La surface de la terre change, mais qu’en est-il de ses profondeurs…

Alice, c’est la plus jeune des bugadières à Méthamis. Cette guerro de malur lui a pris son bien-aimé, Ange. Mais la vie continue et aujourd’hui c’est la bugade, la lessive.Les anciennes photographies utilisées pour illustrer cette histoire, nous ont été confiées par l’association des Badaïres de Méthamis, un groupe de passionnés qui s’est donné pour mission de sauvegarder la mémoire de son village. Les visages redessinés par Nadège Poupaert sont inspirés de ces vieilles photos.

1919, si l’automobile existe déjà, ici on marche. Les chemins sont ainsi des lieux où l’on se croise, on y cause beaucoup, on prend des nouvelles. On rencontrera le berger, la cueilleuse de simples, les paysans qui montent dans les bancau, les terrasses et ceux qui en descendent avec leur butin de chasse.Dans cette histoire, un personnage détient la clef ce qui « pose problème ». C’est celui qui sait, qui lit les signes de la nature, du ciel, de l’en deçà et de l’au-delà, c’est le berger.

Vous êtes à présent au-dessus de la Nesque. Ici, les falaises ont laissé ce petit bout de terre où la caillasse pousse entre les herbes, les Devens, ce qui autrefois était défendu ! Regardez, il reste comme les traces d’une ancienne civilisation. Le paysage est clôturé de murets, ils apparaissent encore entre les bouquets de chênes verts. Il fallait libérer la terre, ranger les pierres, ces millions de pierres, une tâche sans fin car à la pluie, les pierres remontaient et le paysan recommençait.

La pierre sèche est une technique de construction remontant à l’Antiquité. La pierre est callée, il n’y a pas de mortier, c’est l’œil du paysan, la justesse de l’imbrication qui maintiennent l’ensemble.Vous êtes ici à la cabane du cœur des pierres, restaurée par l’association des Badaïres en 2022, et ce, lors d’une rencontre européenne avec l'île de Brač (Croatie). Petit rappel de vocabulaire : ici on ne dit pas « borie », mais « cabane ».

Les plantes, seraient-elles plus ingénieuses que leurs compères du monde animal, puisque fixées au sol, elles sont dans l’obligation de faire face ! Le manque d’eau est, alors, leur pire ennemi, 1er maillon de la chaine alimentaire, elles sont là pour être mangées, et à tout cela s’ajoute une quasi-obsession, se reproduire… sans se déplacer. Alors sachez que la plante expérimente l’apprentissage, de fait elle serait douée de mémoire, des aptitudes correspondant à la définition de l’intelligence… 

Nous avons fait le choix de remettre sur le chemin des gens du pays. Vous avez croisé l’abbé Augier, la veuve Duplastre, le vieux Louis, la vieille nonne à cornette, Monsieur Icard, le maire et Le Mile, le facteur.  Ils ont tous arpentés, un jour, ces chemins filant à l’aplomb des gorges de la Nesque. Ils y avaient des oliviers, des ruches, quelques maigres champs, une cabane…

Il vous faut le décor, les odeurs du soleil, les bouquets de la garrigue, la lumière de la pierre au petit matin, les aboiements du chevreuil en soirée, le vertige face au gouffre… Suivez Alice qui court derrière sa chèvre !Un dernier conseil, surtout ne lutter pas ! Car à la lecture des quelques mots de provençal qui ponctuent les textes, il se peut vous preniez l’accent du soleil. Un grand merci à Prouvençau Lengo Vivo et Escolo dóu Ventour.