Rando des Leus

Henri Degorge : un bâtisseur du paysage forestier et industrielEntre 1828 et 1842, Henri Degorge acquiert, par trois transactions successives, un vaste territoire qu’il réunit pour former un domaine forestier de 545 hectares. Ce domaine s’étendait en continuité avec les bois d’Audenarde, de Blaugies et de Saint-Ghislain, reconstituant ainsi une importante unité forestière.Mais Henri Degorge est surtout connu comme le principal fondateur de la grande industrie houillère du Borinage, notamment en tant que créateur du complexe minier du Grand-Hornu, véritable modèle de cité industrielle au XIXe siècle.Une forêt aménagée à des fins d’exploitation raisonnéeDans le souci d’organiser l’exploitation forestière, Degorge commande à l’architecte parisien Jacques-Marie Huvé dit Séquenard – connu pour avoir participé à l’aménagement des Jardins des Tuileries – l’établissement de plans d’allées structurées au sein de la forêt.Ces allées de desserte, dont l’Allée Degorge est l’un des plus beaux exemples, visaient à faciliter le transport du bois et l’accès aux différentes parcelles pour la gestion sylvicole.

Des chemins pastoraux devenus témoins du passéPour rejoindre les pâturages, les troupeaux empruntaient plusieurs chemins ruraux dont les noms évoquent encore leur fonction :la rue des Vachesles Passesla rue du Grand Pasagela Plaine de la CommuneCes voies historiques forment aujourd’hui un réseau de sentiers de promenade, rappelant la vie pastorale d’autrefois.La forêt, repaire des loupsÀ cette époque, des loups peuplaient encore la forêt et trouvaient dans ces pâturages proches un terrain de chasse facile. Les attaques de troupeaux étaient fréquentes, notamment en hiver, quand les proies naturelles se faisaient rares.Ce lien entre les activités humaines et la faune sauvage illustre la cohabitation complexe entre l’homme et la nature dans le Borinage rural.

Principales essences présentes dans la forêtVous pourrez y observer les espèces suivantes :Feuillus indigènes : Aulne glutineux, Bouleau verruqueux, Charme, Châtaignier, Chêne pédonculé, Frêne, Hêtre, Érable sycomore, Érable plane, Mérisier, Noisetier, Orme, Sorbier, Sureau, Tilleul à grandes feuillesEssences introduites ou cultivées : Chêne rouge d'Amérique, Mélèze, Robinier (Faux acacia)Arbustes et sous-boisLe sous-étage forestier est tout aussi riche, avec notamment :Chèvrefeuille des boisHoux à feuilles épineusesLierre grimpantCes espèces contribuent à l’équilibre de l’écosystème forestier et offrent abri et nourriture à la faune locale.Apprendre à reconnaître les feuillesPour enrichir votre balade, vous pouvez apprendre à identifier les feuilles de ces arbres et arbustes grâce à notre galerie de photos explicatives. Une belle manière de se reconnecter à la nature tout en développant ses connaissances botaniques !

1. La Jonquille (Narcissus pseudonarcissus)Description : fleur jaune en forme d’entonnoir, surmontée d’un périanthe étalé en forme de roue dentée.Attention : cette plante toxique provoque de graves empoisonnements, notamment par sa tige et son bulbe.Règlementation : la cueillette est strictement encadrée : → Pas plus de deux poignées par personne → Interdiction d’arracher les bulbes (Article 50 du Code Forestier)2. La Jacinthe des bois (Hyacinthoides non-scripta)Description : plante vivace formant de vastes tapis bleutés au printemps.Fleurs en clochettes allongées, penchées et très parfumées.Elle crée un spectacle visuel unique dans les sous-bois de hêtres et de chênes.3. L’Anémone Sylvie (Anemone nemorosa)Description : délicate fleur blanche à 6 à 8 pétales, parfois marbrés de rose ou de rouge.Ses feuilles palmées émergent directement du rhizome souterrain.Elle est l’un des premiers signes du printemps forestier.Découvrez ces fleurs en imagesPour apprendre à les reconnaître sur le terrain, des photos de chaque espèce sont mises à votre disposition (en ligne ou sur les panneaux pédagogiques du sentier).N’hésitez pas à les observer… sans les déranger

Les oiseaux de la forêtPic épeiche (Dendrocopos major)Plumage noir et blanc avec une tache rouge sur le ventre ou la tête.C’est un oiseau cavernicole : il niche dans les arbres creux ou creuse lui-même son nid dans le bois mort.Geai des chênes (Garrulus glandarius)Reconnaissable en vol à son croupion blanc très visible.Oiseau farouche mais bruyant, il est aussi un excellent imitateur de sons et de cris d’autres espèces.Sittelle torchepot (Sitta europaea)Petit oiseau trapu qui descend les troncs tête en bas.Il niche dans les cavités naturelles dont il rétrécit l’entrée avec de la boue, d’où son nom de "torchepot".Les mammifères de la forêtChevreuil (Capreolus capreolus)C’est le plus grand mammifère de la forêt de Colfontaine.Son pelage varie selon les saisons, du brun roux en été au gris-brun en hiver.Écureuil roux (Sciurus vulgaris)Pelage allant du roux vif au brun foncé, parfois presque noir.En hiver, il se distingue par les longues touffes de poils sur ses oreilles.Apprenez à les reconnaîtreDes photos illustratives sont disponibles pour vous aider à identifier ces espèces lors de vos balades. Observez-les dans le respect de leur tranquillité, sans les déranger.

Une auberge légendaire : la Belle MaisonÀ la fin du XVIIIe siècle, la demeure est transformée en auberge, baptisée La Belle Maison. En 1795, elle est tenue par un certain sieur Buisseret. Mais ce lieu paisible devient rapidement célèbre pour une tout autre raison : il aurait servi de point de rencontre pour la « Bande à Moneuse », entre 1794 et 1798.Une anecdote marquante de MoneuseUn jour, Antoine-Joseph Moneuse, le célèbre brigand du Borinage, s’y attable. Il y rencontre un marchand de bestiaux d’Eugies et Célestin Carlot, un simple ouvrier. À la sortie du cabaret, Moneuse tente d’enrôler Carlot pour détrousser le marchand, lui disant :« Fais équipe avec moi. »Carlot décline fermement la proposition :« Je ne suis pas celui que tu crois. »Ce à quoi Moneuse réplique, avec un sourire énigmatique :« Moi non plus, Carlot, je ne suis pas ce que tu penses. »Pris de panique, Carlot s’enfuit. Moneuse, amusé, retourne à l’intérieur raconter l’histoire à l’assemblée. Ce côté farceur et provocateur – bien qu’anecdotique – contribuera malgré lui à nourrir les rumeurs sur son compte… et précipitera, avec le temps, sa chute.

Une tour construite par l’architecte et brasseur Achille TillierC’est au début des années 1900 qu’Achille Tillier, architecte et fondateur de la brasserie Tillier, fait l’acquisition d’une pâture à la commune d’Eugies. Sur ces terres, il construit un édifice original qu’il baptise « La Tour du Lait Buré » – un nom faisant référence au lait battu, selon le parler borain (source : Essai d’illustration du parler borain par André Capron et Pierre Nisolle).Une guinguette en pleine nature pour savourer les bières localesDans ce cadre pittoresque, Achille Tillier ouvre un cabaret champêtre, rapidement transformé en guinguette où il sert les bières de sa propre production : Stout Cedar, Saison, Belge, Blanche, Grisette, etc.La tour, à l’origine dotée d’un toit plat, offrait un espace idéal pour l’observation de la nature, la chasse ou l’installation de musiciens – remplacés plus tard par le tourne-disque, après la Première Guerre mondiale.Une toiture conique et des rénovations successivesEn 1955, la toiture est entièrement refaite par une entreprise hollandaise, sous l’impulsion de Victor-Léon et Léon-Willy Tillier, respectivement fils et petit-fils du fondateur. Elle adopte alors sa forme conique caractéristique, qui sera rénovée une seconde fois dans les années 1980.En septembre 1972, La Tour du Lait Buré est officiellement rénovée et inaugurée, en présence du Collège Communal et du Député-Bourgmestre Arthur Nazé. L’intérieur est repensé :un comptoir circulaire épouse la forme du bâtiment,une annexe appelée « Gambrinus » est ajoutée, pouvant accueillir une vingtaine de personnes,une terrasse et une aire de jeux sont aménagées pour le plaisir des familles et promeneurs.Un lieu convivial au charme rustiqueAujourd’hui, La Tour du Lait Buré conserve tout son charme rustique, offrant un cadre chaleureux et reposant aux visiteurs après une balade en forêt. Entre patrimoine brassicole, mémoire locale et accueil authentique, elle incarne l’esprit du Borinage et de la Wallonie rurale.

Le charme, un arbre discret mais essentielLe charme commun (Carpinus betulus) est un arbre forestier typique des sous-bois. Il supporte très bien l’ombre, ce qui lui permet de pousser sous la canopée des grandes forêts feuillues. Ses fruits ailés, semblables à ceux de l’érable, sont adaptés pour être dispersés par le vent, favorisant ainsi une germination multiple et la régénération naturelle de la forêt.Cette association entre élément aquatique et écosystème forestier fait de la Source aux Charmes un lieu riche en biodiversité, parfait pour une pause nature lors d’une promenade à Colfontaine.

Un peu de géologie : poudingue et arkoseLe Ravin des Ramons est une ancienne carrière creusée dans deux types de roches caractéristiques :Le Poudingue, un conglomérat formé il y a des millions d’années par le mélange de débris de l’érosion continentale avec des sédiments marins apportés lors des transgressions et régressions de la mer.Les Arkoses du Houiller, des roches sédimentaires composées de fragments détritiques issus de l’érosion des massifs anciens.Origine du nom : entre artisanat et mémoire localeIl y a plus d’un siècle, un artisan solitaire s’était installé sur ce site, dans une baraque rudimentaire, pour y fabriquer des balais (ou ramons) à partir de branches de bouleau. Chaque semaine, il descendait au village avec sa hotte remplie de balais prêts à être vendus.C’est en souvenir de cette activité artisanale que le site a été baptisé « Ravin des Ramons ».Une carrière utilisée pour la construction et les tests miniersPendant plusieurs années, les grès affleurants ont été exploités sur le site. Ce matériau de construction servait à ériger des habitations, des murs ou à empierrer des chemins dans la région.Par ailleurs, l’Institut des Mines y a creusé des galeries expérimentales dans la roche pour tester des explosifs en conditions réelles, notamment en présence de grisou – ce gaz méthane très inflammable présent dans les mines de charbon. Les redoutés "coups de grisou" ont longtemps été la hantise des mineurs borains, causant de nombreuses pertes humaines.Légendes locales : des souterrains secrets ?Selon la rumeur populaire, des galeries souterraines partiraient du Ravin des Ramons et rejoindraient les anciennes abbayes de la Cour à Colfontaine et de Saint-Ghislain. Si aucun élément historique ne permet de confirmer cette hypothèse, elle contribue au mystère et à l’attrait légendaire du lieu.

Ce vaste ensemble forestier constitue l’un des plus grands poumons verts du Borinage, en Région wallonne, et un haut lieu de biodiversité.

Deux villas romaines enfouies sous la forêtDeux villas gallo-romaines ont été identifiées sur le territoire de la forêt. Leurs emplacements sont encore visibles aujourd’hui, même si les structures ont été en grande partie détruites.La célèbre "Cave du R'mite" est probablement la voûte d’une ancienne cave romaine, vestige d’une de ces villas.Une seconde villa aurait été située à environ 200 mètres du lieu-dit "Grand Pré", près des Robertsarts, également en pleine forêt.Fin brutale sous les invasions franquesCes villas auraient été abandonnées ou détruites vers 271 après J.-C., à l’époque des secondes invasions franques. Les dernières pièces de monnaie retrouvées sur le site datent de Postume Sévère (258-267), empereur de l’Empire des Gaules, ce qui renforce cette hypothèse.Une mémoire toponymique persistanteLa mémoire de cette époque est encore présente dans la toponymie locale : la "Rue du Camp Romain", qui part du quartier du Cul-du-Q'vau pour rejoindre le bois, en est un témoin parlant. Ce nom suggère la présence ancienne d’un campement militaire ou d’un établissement romain fortifié.