Tour de la Vuzelle : la Vanoise secrète

Vous êtes au col de Leschaux, surplombant sur son adret le ravin éponyme. Le terme « leschaux » vient probablement du pré-roman « calmis » qui se traduit par « pâturage », « prairies » ou encore par « alpe ». 

Le lycopode alpin (Diaphastrum alpinum) est lié à la lande rase, sèche, à plage de sol nu à éricacées (bruyère). C'est une espèce artico-alpine, qui comme l'adjectif la qualifiant, est originaire du nord de l'Europe. Elle a trouvé refuge en altitude dans les Alpes, lors du réchauffement climatique qui a eu lieu après la dernière glaciation. C'est une espèce protégée en France. En dehors de l'automne où ses tiges reproductives - vert clair - sont visibles, elle reste peu détectable à l’œil néophyte.

La perdrix des neiges, autre nom du lagopède alpin, est elle aussi une espèce artico-alpine. Elle est inféodée aux milieux des moraines, éboulis et pelouses rases d'altitude. Elle fait partie des galliformes de montagne comme le tétras-lyre, la gélinotte des bois ou la perdrix bartavelle chère à Marcel Pagnol. En adaptation aux rigueurs hivernales, elle troque son plumage gris d'été pour un blanc uni, a les pattes couvertes entièrement de plumes et se tient dans un igloo durant les froids intenses.

L'androsace alpine (Androsace alpina) est une espèce protégée au niveau national. Elle aime les éboulis fins et les moraines, sur sol siliceux. Son record altitudinal est de 3350 m à Bessans. Les prospections des garde-moniteurs du Parc national de la Vanoise ont permis de la localiser sur tous les territoires potentiels… et de répertorier 50 % des populations connues en France. 

L'alpage de la Vuzelle est l'un des 3 alpages communaux de Planay. Historiquement, il recevait une partie des vaches laitières des différents hameaux et le fromage était fabriqué sur place en été. Actuellement, seul un troupeau de génisses occupe le lieu en été. Particularité montagnarde, certaines communes possèdent des alpages sur le territoire de communes plus en altitude. Ainsi, Le Planay possède les alpages de Ritort et des Nants, lesquels sont pourtant situés sur la commune de Pralognan-la-Vanoise.

Rien d'alarmant ! Ici, le seul envahisseur est la forêt qui colonise, petit à petit, les landes à rhododendrons. Cette aire en limite supérieure de forêt est un habitat essentiel du tétras-lyre (Tetrao tetrix). Elle lui permet tour à tour de nicher sous un couvert semi-ligneux, d'élever et alimenter les jeunes (insectes, baies et graminées), de se nourrir à l'automne (myrtilles) voire en hiver (bourgeon des arbres) et d'accueillir ses parades nuptiales.

Dans les pessières qui vous font face, deux oiseaux utilisent successivement le même nid. Tout d'abord, le pic noir (Dryocopus martius) creuse une loge en évidant le tronc d'un grand épicéa.  Après une saison de reproduction, il abandonne son nid. La chouette de Tengmalm s'en empare alors l'année suivante, afin d'élever à son tour sa progéniture. Ainsi, pas de vieux épicéas, pas de pic noir ; pas de pic noir, pas de chouette de Tengmalm !

Différents milieux se côtoient sur ce parcours : pessière, aulnaies, forêt mixte avec feuillus. On y rencontre un éventail d'espèces de mésanges : la mésange charbonnière (la plus grande), la mésange noire, la mésange huppée ou encore la gracile mésange à longue queue. Durant l'hiver, il arrive que les mésanges de toutes espèces se regroupent en bandes de plusieurs dizaines d'individus, afin de mieux se protéger contre les  prédateurs ailés (chevêchette d'Europe ou épervier).

Nichée sous la Pointe de la Vuzelle, la cascade du même nom récolte l'eau du bassin versant qui va du Grand Bec jusqu'à la pointe de Leschaux, en passant par la pointe du Creux Noir. Haute de près de 200 mètres et classée dès 1935 au patrimoine naturel de l’environnement, cette spectaculaire cascade domine le vallon du Doron de Pralognan.

En redescendant dans l'axe de la vallée, vous observez le mont Jovet (alt. 2558 m), à sa droite devant vous, vous l'avez reconnue : l'aiguille de la Vuzelle (alt. 2573 m). À l'arrière du village de Pralognan-la-Vanoise, on admire les glaciers de la Vanoise, plus grande calotte glaciaire continentale européenne avec près de 1960 ha, qui culmine au dôme de Chasseforêt, à 3586 m. En revenant vers l'ouest, les dents de la Portetta et la crête du mont Charvet vous ramènent plein nord à la dent du Villard (cachée).

À cet endroit, vous vous trouvez à l'aplomb d'une des nombreuses galeries perçant le massif de la Vanoise. En effet, la « houille blanche » est la seule production électrique industrielle en Savoie. L'usine hydro-électrique située au Villard du Planay turbine, en plus de l'eau du vallon de Champagny-le-Haut, une partie des eaux du col de la Vanoise et du doron de Chavière, via une galerie à même la montagne et une conduite forcée. Et, s'il vous plaît, sans visée laser !

Vous êtes au lieu-dit « Les Darbelays ». En patois local, un darbel est un jeune plan d'épicéa. Ainsi, les Darbelays peut être traduit par une pépinière d'épicéas ; le lieu-dit « Les Darbelots » à Planay, traduit probablement une forêt d'épicéa, pessière en français.