Cascade de la Lance

Le passage intensif des grands troupeaux érodant le sol, démantelant le couvert végétal et le déboisement excessif pour la reconstruction, laissent le sol nu et vulnérable aux pluies torrentielles qui s'abattent sur la vallée.En 1787, la moitié des terres cultivées est emportée. Le Verdon et la Lance en crue ont arraché leurs digues au point de laisser les approches de la ville à découvert et exposées à l'irruption des eaux de la Lance à la moindre crue.Un seul remède : le reboisement que l'État entreprend avec succès à la fin du XIXe siècle.

À la fin du XIXème siècle, la politique forestière commence à porter ses fruits : le canton de Colmars peut alimenter cette scierie hydraulique. Elle est rachetée en 1920 par La Compagnie d'Exploitation des Bois de la Haute Vallée du Verdon, dirigée par deux Niçois : Lempereur et Carré. Dès 1922, l'affaire périclite : " L'actif est absorbé par le passif " ; Carré se retire. Lempereur garde espoir. Mais cinq ans plus tard, c'est la faillite. La scierie est abandonnée.

Couverts de lichens, les blocs de grès d'Annot présentent un grain assez gros ; leur forme arrondie raconte une histoire, celle d'un voyage au sein du glacier il y a 10 000 ans, depuis  la montagne loin en amont, qui s'est achevé par le lent travail d'érosion des eaux du torrent.Nus, aux arêtes vives, ce sont des blocs de calcaire que le gel, en agrandissant les fissures, a séparés de la falaise toute proche.

Après sa chute, l'eau s'enfonce profondément sous la surface lisse de la vasque. Au fond, le lit du torrent subit les coups de boutoir de la force insistante de l'onde. Une sorte de marmite de géant se creuse, de plus en plus polie, de plus en plus profonde, de plus en plus tournoyante ; elle est le bassin de réception des blocs de pierre emportés par le torrent, qui jouent les agents abrasifs avant de continuer leur course vers l'aval.

Oiseau-souris lorsque, gris et noir, il court sur la roche suintante, agrippé par ses longues griffes. Oiseau-papillon lorsqu'il déploie ses ailes rouge carmin tachetées de blanc. Cet habitant des grandes parois d'Europe et d'Asie est fidèle à son gîte bien que l'hiver l'incite à chercher refuge dans les clochers de la vallée. Quel plaisir de saisir ses allées et venues rapides, véritables " éclairs de feu se détachant dans la grisaille du gouffre ".