Balade sonore - Découverte de Wimmenau

La première mention écrite de Wimmenau ou Wimenawe remonte à 836, elle figure dans un document qui raconte le transfert des reliques de Saint Adelphe de Metz à Neuwiller-les-Saverne. Wimmenau s’est établit au sein d’une clairière dégagée suite aux défrichements de la forêt effectués sous la domination des sires d’Ettendorf dont les armes sont représentées sur le blason du village. Les origines du nom « Wimmenau » nous renseigne encore davantage sur sa situation géographique : « Wimi » fait allusion à l’eau et « au » au site où est implanté le village. En effet, c’est aux bords de la Moder que Wimmenau s’est développé. Une légende évoque une toute autre origine : Autrefois, alors qu’un cavalier passait sur le territoire, un vent violent se leva soudainement et lui projeta des grains de sable dans les yeux. Il s’écria : « Oh ! Weh min Aou » (Que mon œil me fait mal), d’où le nom de Wimmenau. A vous de choisir l’explication que vous préférez ! Forte de sa position aux pieds des premiers contreforts vosgiens, le village fut aussi un carrefour important, à la croisée de deux anciennes routes : celtique reliant Haguenau à Sarre-Union et romaine menant de Strasbourg à Sarrebrück. Cet habitant nous parle des origines du village et d'une autre version de la légende liée à son nom :

Au n°34 de la rue principale se trouve un témoin des habitudes des habitants du milieu du XXe siècle qui exerçaient souvent une double activité : une maison de forgeron avec d’importantes dépendances agricoles. L’atelier de maréchalerie sur la rue vient compléter l’ensemble daté de 1897. En ce lieu, dans cette grange moderne, se trouve une importante collection d’anciens engins agricoles qui nous replonge dans l’histoire de l’agriculture au village. A Wimmenau au milieu du XIXe siècle, les terres cultivables sont rares et peu fertiles. Cette situation pousse de nombreuses familles à s’expatrier aux Etats-Unis, où elles espèrent trouver des terres plus riches. Les habitants restés au village ont peu de ressources, ils travaillent dur pour subvenir à leurs besoins. Ainsi, les hommes exercent souvent plusieurs métiers afin de compléter les revenus de leur exploitation agricole. Le travail des agriculteurs est physique, d’autant plus que jusqu’aux années 1950 les exploitations sont très peu mécanisées. Avec le temps, de plus en plus de paysans font le choix d’exploiter des prés à Wingen et à Ingwiller où les terres argilo-calcaires fournissent une herbe plus riche en éléments nutritifs. Les principales céréales cultivées sont le seigle et le chanvre. La culture de la pomme de terre est également très répandue, elle constitue l’aliment de base des habitants. Dans la première moitié du XXe siècle, la création de la coopérative agricole puis de la laiterie, vise à améliorer le quotidien des paysans. Malgré la généralisation des tracteurs de 1960 à 1975, l’activité agricole décline d’année en année. Traversez la rue principale pour en apprendre davantage sur la guerre de trente ans et découvrir la maison suisse. Revivez la journée aux champs des habitants en écoutant leurs souvenirs :

Au XVIIe siècle, la guerre de Trente ans a marqué l’histoire de l’Alsace. A cette époque, notre région était composée de nombreuses seigneuries et villes libres ralliées au Saint Empire romain germanique, gouvernées par la puissante famille des Habsbourg. A la même période, Louis XIII règne sur le Royaume de France, Louis XIV lui succèdera. Le point de départ du conflit se situe le 23 mai 1618 lorsque les praguois, habitants du Royaume de Bohème, se révoltent contre la domination des Habsbourg en jetant par les fenêtres du château les envoyés de l’empereur Ferdinand II : c’est la Défenestration de Prague. Débute alors une guerre politique mais aussi confessionnelle opposant catholiques et protestants. En plus de ces rivalités, cette première moitié du XVIIe siècle est également marquée par une crise économique. Le conflit arrive en Alsace en 1621. Les atouts de ce territoire sont multiples : sa situation géographique sur le couloir Nord-Sud qu’est la Vallée du Rhin et ses trois ponts sur le Rhin à Kehl, Brisach et Bâle qui en font une importante plaque tournante vers le reste de l’Europe. Ainsi, cette région est le théâtre de nombreux affrontements pendant plusieurs années : en 1621 et 1622 les Suédois arrivent en Alsace ; de 1635 à 1639 c’est au tour des Français d’intervenir. Ces jeux de pouvoir prennent fin en 1648 avec les traités de Westphalie qui marquent la fin de la guerre. En résulte l’annexion partielle de l’Alsace au Royaume de France : le roi obtient les droits et propriétés des Habsbourg, soit près de 80% du territoire. La suite de l’annexion se fera progressivement et prendra fin sous Louis XIV qui annexera Strasbourg en 1681, une année plus tard que Wimmenau. A partir de 1662, des mesures de repeuplement sont mises en place, elles consistent à inciter des étrangers à venir s’installer en Alsace. Ceux-ci viennent principalement de Suisse. Après une période de prospérité économique et commerciale pendant la guerre de Trente Ans, la Suisse connaît autour de 1650 une grave crise économique engendrant de violentes révoltes paysannes. Les suisses sont donc enclins à quitter leur pays. Et Wimmenau dans tout ça ? Les violents affrontements ont eu raison du village dont seul le clocher de l’église subsistait au terme du conflit. Les derniers habitants se sont réfugiés à Ingwiller, laissant le village inoccupé jusqu’en 1655. C’est à ce moment que les immigrants suisses entrent en jeu. Progressivement ils repeuplent le village et le font revivre. Avec eux, ils apportent leurs savoirs faire en tant que marcaires, gardiens de troupeaux ou encore laitiers. La famille Scherer construit la première maison du nouveau village en 1669, appelée encore aujourd’hui « La maison suisse ». Vous souhaitez en savoir plus sur cette période? Écoutez Jean-Claude :

Après la guerre de Trente Ans (1618-1648) et ses nombreuses destructions, des immigrants suisses arrivent à Wimmenau dès 1655, ils permettent son repeuplement et son extension. La maison Scherer ou maison suisse fut bâtie dans le style Renaissance de l’Oberland bernois en 1669, elle a été transformée en 1718 et en 1800. L’Association pour la Protection du Patrimoine l’entretient depuis 20 ans et collecte les objets de la vie rurale des Vosges du Nord. La maison a été restaurée en respectant strictement les découvertes archéologiques : encadrements de portes et de fenêtres en grès peints en couleur sombre, bois du colombage teinté en gris, liserés noirs encadrant les panneaux de torchis ou de grès entre les poutres… Cette architecture de pierre et de pan de bois présente la particularité d’être séparée en deux dans le sens de la longueur par une cloison interne. Une porcherie et une remise prolongent la maison. Sur la façade sur rue figurent deux inscriptions murales moralisatrices : MANCHER THUT FÜR MICH SORGEN / THUT MIR DOCH WEDER LIECHEN NOCH BORGEN / ICH WOLT DASS ER SEIN SORGEN LIESS / UND MICH DAFÜR VIEL GLÜCK AUSTIESS : « On se fait souvent du souci pour moi / Mais personne ne souhaite me faire de prêt / Qu’ils cessent donc de se faire du mauvais sang pour moi / Et que la Providence me soit favorable. » VERACHT NICHT MICH UND DIE MEINEN BESCHAU VOR DICH UND DIE DEINEN SIEH NICHT AUF MICH SONDER AUF DICH GEHST AUCH UNRECHT SO HÜTE DU DICH « N’aie de mépris ni pour moi ni pour les miens / Soucie-toi de toi-même et des tiens / Ne me regarde pas moi, mais regarde-toi /Toi aussi, tu vas de travers, Alors surveille-toi toi-même. » Après la tour-clocher de l’église, la maison suisse est la plus ancienne construction du village dont le millésime de 1669 est gravé sur le linteau de la cave. Jean-Claude Scherer, vous parle de cet endroit :

Outre la maison, le complexe comporte une forge et des dépendances du XIXe abritant un moulin à huile (noix et colza) à traction animale classé monument historique en 1984 pour son mécanisme d’entrainement en bois ingénieux. Ces bâtiments ont été sauvés et valorisés par l'association de protection du patrimoine créée en 1984. Pour en savoir plus, écoutez ce témoignage :

Vous vous trouvez actuellement sur les bords de la Moder. La Moder est un affluent du Rhin et la rivière la plus importante du Nord de l’Alsace. Elle parcoure de nombreux paysages et divers villages et villes. Les anciennes cartes du territoire prêtent plusieurs noms à cet important cours d’eau : Madra, Matra, Mutter, Moter ou encore Mother. Tous ces noms se rattachent à la Mère, source de vie tout comme l’eau est une source de vie pour les hommes et les animaux. Empruntez le petit sentier qui longe l'eau pour poursuivre votre visite tout en écoutant des habitants du village parler des poissons qu'on pouvait attraper dans la Moder :

C'est ici, à l'emplacement de l'actuelle caserne, que se trouvait le lavoir du village. Les habitants s'y retrouvaient pour laver leur linge, discuter... Si vous souhaitez en savoir plus, écoutez ces wimmenauviens :

Tôt le matin, le gardien passait dans les rues du village pour récupérer les cochons et les mener jusqu'à la forêt du Rebberg pour la journée. Cette escapade permettait aux animaux de se nourrir de glands, de faînes, de champignons et de fruits. Tout comme le berger, le gardien était accompagné d'un chien qui l'aidait à garder le troupeau. Le soir il redescendait dans le village en empruntant la rue Hohl et tous les cochons rentraient chez eux. Suivez les traces de Louis Ruch, né en 1883, qui pratiqua cette activité pendant quelques années en parcourant la rue Hohl jusqu'à l'orée de la forêt. Marchez tout en écoutant le témoignage de ces habitants :

Chaque année, le village était en fête à l'occasion du messti. Écoutez Simone vous parler de sa fameuse robe de messti :

L’église protestante Saint-André date du XII-XIIIe siècle pour ses parties les plus anciennes. Du premier sanctuaire dédié à Saint-André il ne subsiste que la tour qui servait à la fois de chœur et de clocher, couverte par un toit en bâtière. Suite au passage de la guerre de 30 ans, le village fut entièrement détruit, seul le clocher de l’église résista aux attaques. Sur son élévation orientale, l’église présente des baies romanes géminées à colonnette centrale. Les fenêtres en arc brisé datent sans doute du XIVe siècle, époque où le chœur fut voûté d’ogives. Après l’introduction de la Réforme en 1570 sous les sires de Hanau-Lichtenberg, la nef a été restaurée en 1681 puis agrandie en 1878. La restauration de l’édifice, inscrit au titre de Monuments Historiques, a permis de redécouvrir les peintures murales du XVIe siècle. Situées sur les murs du chœur, elles avaient été recouvertes de badigeon. A cette occasion, le mur de l’ancien cimetière fut également remis en état.